Problématique des déchets d’exploitation, de maintenance et de démantèlement des réacteurs électronucléaires
Au moment de l’étude du projet, 9 réacteurs électronucléaires sont à l’arrêt définitif en France :
- trois réacteurs à Chinon (Indre-et-Loire),
deux réacteurs à Saint-Laurent-des-Eaux (Loir-et-Cher)
et le réacteur Bugey 1 (Ain), à uranium naturel modérés par du graphite et refroidis par du gaz carbonique (filière UNGG conçue par le CEA, destinée à la production de plutonium à usage militaire et accessoirement à la production d’électricité, exploitée par EDF avant d’être définitivement abandonnée après deux fusions partielles de « cœurs » de réacteurs à Saint-Laurent-des-Eaux ayant entraîné une pollution de la Loire par du plutonium), - le réacteur à eau lourde de Brennilis en Bretagne (conçu également par le CEA et qui n’a jamais fonctionné correctement),
- le réacteur à eau pressurisée Chooz A dans les Ardennes (projet franco-belge construit sous licence américaine Westinghouse et dont l’exploitation a provoqué plusieurs incidents graves),
- le réacteur Superphénix à Creys-Malville dans l’Isère (conçu par le CEA, financé par la société européenne NERSA et exploité avec le « succès » que l’on sait par EDF).
EDF, propriétaire de ces 9 réacteurs, prévoit de les démanteler (à cette époque, les deux de Fessenheim sont encore en service et n’entrent pas alors dans le cadre du projet ICEDA).
Selon une première estimation faite par EDF en 2006, ces démantèlements devaient générer 1 000 000 tonnes de déchets au total dont 33% radioactifs (donc 330 000 tonnes).
Par ailleurs, les centrales nucléaires en activité génèrent, en plus des déchets que constituent les combustibles nucléaires usés, de grandes quantités de déchets radioactifs.
Par exemple, les couvercles de cuve ou les générateurs de vapeurs, qui doivent être changés tous les 20 ans environ, sont d’énormes pièces métalliques radioactives très encombrantes.
D’autres déchets d’exploitation, comme des grappes de commande, encombrent les piscines de désactivation des réacteurs nucléaires. Celles des plus anciens manquent de place pour entreposer les futurs combustibles usés, qu’EDF prévoit de continuer à produire. Et les piscines de l’usine de « retraitement » de La Hague, qui est leur exutoire après refroidissement sur sites, approchent de la saturation.
Les quantités totales de ces déchets radioactifs d’exploitation et de maintenance sont difficiles à évaluer, car elles dépendent de l’avenir de ces réacteurs.
Une estimation des déchets déjà produits ou en passe de l’être donne un tonnage du triple au moins des déchets de démantèlement des 9 réacteurs électronucléaires définitivement arrêtés. Le démantèlement des 58 réacteurs en activité n’est pas compté, bien sûr.
Une estimation plus complète est impossible à faire car on ne sait pas exactement quand les réacteurs encore en service seront mis à l’arrêt définitif (souvent gouvernement varie à ce sujet !).
Ces déchets déjà produits sont entreposés sur les sites nucléaires existants qui ne pourront bientôt plus stocker les nouveaux. Et personne n’a envie de les voir arriver à proximité de chez soi ce qui fait que les espaces disponibles sont très rares.
Aussi, l’idée est d’en réduire le volume en les découpant en morceaux pour en déclasser un maximum qui ne seraient alors plus considérés comme dangereux.
De cette façon, EDF a pu modifier son estimation en 2012 : sur les 1 000 000 tonnes de déchets de démantèlement, des 9 réacteurs définitivement arrêtés, il n’y en aurait plus que 20% de radioactifs (donc 200 000 tonnes).
Et dans le cadre du plan national de gestion des déchets nucléaires, la valorisation et le recyclage sont envisagées comme pistes privilégiées pour diminuer la quantité de déchets considérés comme radioactifs.
Et qui dit valorisation et recyclage, dit extraction de leur lieu d’entreposage initial où ils étaient confinés, manipulations, transports, réception et caractérisation, puis découpage et tri de ces déchets radioactifs, c’est-à-dire opérations dangereuses pour la santé et contamination de l’environnement.
Ainsi est né le projet ICEDA : ce sera une usine de découpage, caractérisation, tri et conditionnement de déchets radioactifs.
En langage moins technocratique, on peut dire aussi que ce sera une plaque tournante de déchets radioactifs et de déclassement de ceux-ci, permettant à EDF de retrouver des marges de manœuvre pour continuer à exploiter les réacteurs existants à moindre coût.