Étapes du projet ICEDA

Les principales étapes administratives et judiciaires

 

  1. À l’été 2006, une enquête publique, en vue du décret d’autorisation de création, est organisée sur la seule commune d’implantation du projet, St Vulbas dans l’Ain, qui compte environ 900 habitants. On peut sérieusement s’interroger sur la validité de cette procédure limitée à la commune alors que :
    1. celle-ci est devenue dépendante d’EDF, car elle a construit des équipements très coûteux dont elle ne peut assumer financièrement le fonctionnement sans les taxes payées par EDF,
    2. le projet de décret associait la création de l’ICEDA et le démantèlement du réacteur Bugey 1, dont l’État pensait qu’il ne pouvait qu’avoir l’assentiment des riverains,
    3. le dossier technique fourni était très incomplet, selon les remarques de l’ASN qui n’arriveront qu’après l’enquête publique,
    4. aucune évaluation environnementale n’avait été réalisée.
  2. Le 10 juillet 2006, fort logiquement, le conseil municipal de Saint-Vulbas vote à l’unanimité son opposition au projet du démantèlement du réacteur Bugey 1 et de création de l’ICEDA.
  3. Pour enfoncer le clou, le conseil municipal tente d’inscrire cette opposition dans son Plan Local d’Urbanisme (PLU) adopté en 2008.
    Il écrit, dans le Projet d’Aménagement et de Développement Durable associé au PLU, que la zone d’implantation de la centrale nucléaire (zone UX) sera réservée uniquement à l’activité de la centrale et dans le règlement de la zone UX que « sont interdites toutes les occupations et utilisations du sol non liées et nécessaires à l’activité de la centrale nucléaire ».
  4. Malgré cela, et les nombreuses oppositions inscrites sur le registre d’enquête publique, le commissaire enquêteur donne un avis favorable et le décret d’autorisation de création est promulgué en avril 2010.
  5. La société Roozen, serriste implanté à proximité immédiate de l’ICEDA, le canton et la Ville de Genève, ainsi que 7 associations anti-nucléaires ou environnementalistes, engagent alors un recours contre le décret.
  6. Ils sont tous déboutés par le Conseil d’État qui prétend que le projet ne serait pas soumis à toutes les lois récentes sur la protection de l’environnement et la participation du public. Il ne relèverait que d’une loi de 1963.
  7. Les 7 associations déposent alors un recours à la commission européenne, qui leur donne raison. Cette décision n’a aucun effet contraignant pour le projet.
  8. La société ROOZEN attaque le permis de construire délivré en 2010, presque en même temps que le décret d’autorisation de création, et obtient son annulation grâce au règlement du PLU.
    L’annulation est confirmée en Cour Administrative d’Appel, avec 6 magistrats unanimes pour considérer que le permis de construire n’est pas conforme au PLU de la commune.
  9. En 2012, suite à l’annulation du permis de construire par le Tribunal Administratif, EDF doit arrêter les travaux commencés en 2010. Par représailles, EDF coupe l’eau chaude, produite par le circuit de refroidissement de deux de ses réacteurs, qu’elle fournissait au serriste depuis l’origine. Cette fourniture de chaleur avait déterminé le choix de ce lieu d’implantation des serres.
  10. EDF engage un recours en Conseil d’État, contre l’annulation du permis de construire, et parallèlement fait pression sur le Conseil Municipal de Saint-Vulbas pour que celui-ci modifie le PLU.
  11. Sous la pression, le maire obtempère et indique, pour s’en expliquer auprès de sa population, qu’EDF obtiendra tout ce qu’elle veut, que l’avis de la population et des élus ne compte pas, qu’il est donc inutile et risqué de s’y opposer.
  12. Une révision de PLU, plutôt bâclée, est décidée par le Conseil Municipal selon les souhaits d’EDF.
    Mais elle est attaquée par la société ROOZEN, l’association Sortir du Nucléaire Bugey, la Ville et le canton de Genève.
  13. EDF dépose une demande pour un deuxième permis de construire,identique au premier, qui ne servira à rien, comme on va le voir. Cependant EDF a été obligée de soumettre ce nouveau permis à l’avis de l’Autorité Environnementale qui a soulevé plusieurs anomalies dans le dossier et a demandé de reprendre diverses études relatives notamment au risque d’inondation.
  14. La révision du PLU est annulée par le Tribunal Administratif pour de nombreux vices de forme et de fond. La mairie ne fait pas appel. Le PLU de 2008 est donc remis en vigueur.
  15. Le Conseil d’État donne raison à EDF, et remet en service le premier permis de construire, en jugeant à l’inverse des 6 magistrats du Tribunal Administratif, de la Cour Administrative d’Appel de Lyon et de toute la jurisprudence existante sur les interdictions formulées couramment dans les PLU.
    Le Conseil d’État juge, à propos de l’expression “ Sont interdites les occupations et utilisations du sol non liées et nécessaires à l’activité de la centrale nucléaire » , qu’eu égard à leur objet, ces dispositions doivent être entendues comme subordonnant les autorisations de construire en zone Ux1 à la condition que les travaux dont il s’agit soient liés et nécessaires à l’activité du centre nucléaire du Bugey, mais comme n’imposant pas qu’ils aient pour objet exclusif de répondre à ses besoins ; n’interdit pas le projet ICEDA qui est lié à l’activité de la centrale nucléaire. »
    Cette interprétation est la porte ouverte à tous les abus puisque toute interdiction formulée par un PLU peut être facilement détournée.
  16. La construction, qui avait été arrêtée pendant 3 ans, reprend. Le premier permis de construire ayant été délivré avant la mise en application du « Grenelle de l’environnement », l’avis de l’autorité environnementale, qui ne concernait que le deuxième permis, n’a pas été prise en compte.
  17. Le serriste ROOZEN doit fermer son entreprise et licencier ses 40 salariés. Finalement il sera contraint à vendre ses terres, devenues inexploitables, à EDF qui n’attendait que ça pour agrandir son domaine dans le cadre de l’opération d’achats de terres à proximité de la plupart de ses centrales nucléaires.
  18. En 2016, EDF dépose auprès de l’ASN une demande d’autorisation de mise en service de l’ICEDA avant la fin de la construction.
    L’ASN demande des compléments d’informations et des essais sont réalisés en 2018.
    Les documents complémentaires ne sont fournis qu’en 2019, en particulier la résolution du Comité d’Hygiène de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT), ce qui allonge le délai d’instruction de la demande d’EDF.
  19. Le 29 juillet 2020, l’ASN autorise la mise en exploitation de l’ICEDA après une consultation du public sur un dossier d’EDF de près de 2 000 pages, illisible du fait de l’amalgame de documents divers sans sommaire général ni pagination d’ensemble et impossible à analyser dans le délai d’un mois.
    Cette autorisation est accordée en dépit des avis du public tous négatifs et malgré plusieurs anomalies relevées par l’ASN elle-même : pas de Plan d’Urgence Interne (PUI), pas de programme de gestion de crise en cas d’alarme incendie ou autre, manque de justifications relatives à la sûreté des systèmes de manutention de colis de déchets et à la maîtrise des risques liés à la production d’hydrogène par radiolyse dans l’emballage des « crayons sources » de Chooz A, etc.
  20. Le 22 septembre 2020, les premiers déchets arrivent par camion et par la route : ce sont les crayons source issus de la cuve du réacteur Chooz A en démantèlement dans les Ardennes. Il s’agit de déchets hautement radioactifs, déjà conditionnés et qui vont être entreposés dans les halls de stockage de l’ICEDA en attendant l’hypothétique construction de Cigéo à Bure.
  21. Le 28 septembre 2020, le Canton et la Ville de Genève, ainsi que quatre riverains, déposent un recours en Conseil d’État contre l’autorisation de mise en exploitation accordée par l’ASN à EDF.

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